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Vie d’hier et d’aujourd’hui

De bon matin à la ferme suite ...

dimanche 11 octobre 2009

De Bon Matin à la Ferme (suite)

MP3 - 2.3 Mo

Lorsqu’ils avaient terminé, ils essuyaient leur moustache d’un revers de main, la lame du couteau sur une jambe du pantalon de velours côtelé. Cela semble sale et ne se fait plus maintenant ! J’en demande pardon à Grand-père…… Je savais, au bruit des bancs repoussés, que le repas était terminé. Les souliers martelaient les dalles de la grande salle. La porte s’ouvrait sur le bruit des gonds rouillés, les marches de pierre descendues, les chiens sifflés. Moi, à demi réveillée, cachée sous les draps du lit de Grand-mère, à la place laissée tiède par Grand-père, j’écoutais de toutes mes forces les pas diminuer et les devinais encore, ainsi que les voix et les jappements qui se perdaient ou qui m’arrivaient encore par instants,

A certains détours des chemins.

La grande salle retrouvait son calme, troublé seulement par le tic-tac du balancier de la haute horloge de bois qui sonnait également tous les quarts d’heure, les demi-heures, et les heures, de façons différentes et énergiques !…

Blotti dans le grand lit, je gardais sur la joue et dans le cœur, le baiser effleuré de Grand-père, baiser chatouillé par la barbe, et le " bon jour petiote ". Le lit était haut, large et empli de duvet d’oie, chaud, vivant, fait de toile de fil blanc, avec un édredon rouge. Le côté près du mur, on l’appelait " la ruelle du lit ". Il m’était arrivé de m’y enfoncer et j’avais hurlé. Grand-mère était accourue, avait grondé en disant " tu me feras damner ". Pour monter dans ce lit, il fallait que je grimpe sur le rebord de bois, et que je me jette pour atteindre le " mitant " du lit…..

Après le départ des hommes, je m’amusais à deviner les travaux de Grand-mère. J’entendais la chaîne du puits descendre au fond, le seau remonter avec un grincement continu, et racler la margelle usée à cet endroit. Grand-mère ne voulait pas que je me rende seule à cet endroit. Mais j’étais attirée par les jolies fougères minuscules qui s’accrochaient aux parois intérieures. Grand-mère portait deux grands seaux, c’était lourd. Puis elle entrait dans la grande salle. La lumière du jour naissant entrait avec elle. Elle calait la lourde porte de bois, et celle-ci par beau temps restait ouverte tout le jour.

Ode.


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Raymond de Cagny