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lundi 10 novembre 2008
LA DRÔLE DE GUERRE - 3
Un jour, maman me dit " Papa pense que tu serais mieux chez grand mère, la guerre va mal "…
Bien sûr, j’aurais bien aimé. Mais j’avais mon père et ma mère, Pierre, Jean et Martine et le certificat d’études avec Madame Audrery.
Les jours s’effilochaient lentement mais sûrement avec un malaise qui s’amplifiait de jour en jour. Un mot était apparu dans les conversations " l’exode ".
Des Belges, des gens du Nord arrivaient et repartaient pour plus loin… Mon père ne venait plus. Maman avait dû prendre une employée pour le salon " hommes " . La guerre se perdait…
Ma mère avait été voir mon père, par le train. Elle disait que certains officiers emmenaient, en traction (Citroën) leur famille à la campagne…
Mon père et ma mère pensaient que c’était la débâcle. Mais il ne fallait pas, paraît-il en parler, "Taisez vous, méfiez vous les murs ont des oreilles, ou taisez vous, méfiez vous des oreilles ennemies vous écoutent !…
L’employée du Salon de coiffure voulait partir en Saône et Loire chez ses parents. Maman lui a demandé de me déposer à Clamecy (à 25 km de mon village d’enfance). Mon curé viendrait me chercher pour me remettre à grand mère. La jeune femme continuerait son voyage ensuite pour la Saône et Loire.
Maman mettrait la maison et le Salon en ordre, la voiture au garage, ferait le plus de bagages possible. Elle a certainement pris un des derniers trains en partance. Elle avait essayé vainement de partir avec la Simca, n’ayant pas son permis de conduire, elle avait été refoulée.
Lorsqu’elle est arrivée à Grenois, elle était harassée, triste d’être sans nouvelles de papa.
J’étais heureuse qu’elle soit là.
Je suis donc retournée à la Maison d’Ecole avec cette si jolie institutrice blonde qui m’avait appris à lire (vous la connaissez par mes récits du Morvan)
J’ai retrouvé sur le banc mon amie de communion. Nous sommes parties à Brinon sur Beuvron pour nous présenter au certificat d"études primaires morvandiau… Nous sommes descendues dans une cave. Une bataille d’avions se déroulait au dessus, certainement allemand contre français. Nous étions paniquées ainsi que les autres enfants.
Parmi toutes les matières enseignées par mes deux maîtresses successives se trouvaient bien sûr : calcul, dictée, composition française, histoire, géographie et chant….
Au programme d’avant la défaite, nous pouvions choisir entre la Marseillaise, le Chant du Départ, le vent frivolant, et Ô Magali (je crois ). Les deux premières n’étant plus d’actualité, ma dernière Maîtresse nous avait dit que nous pouvions chanter la Morvandelle.
Si comme je le souhaite, vous avez lu le Morvan, ses forêts et ses coutumes, vous connaissez les paroles….
Nous avons obtenu, mon amie et moi notre C.E.P. et j’étais la mieux notée du Canton…Et voilà l’travail de Madame Audrery
Rien n’était cependant plus pareil. Mais moi non plus.
Grand père n’était plus là, depuis 3 ans déjà, ni sa jument, ni sa carriole. Grand mère n’avait plus que son jardin, quelques poules et lapins.
Depuis quelques années déjà, elle venait passer l’hiver chez nous, en Seine et Oise. Dès que le soleil se repointait, elle disait à mon père "Marcel, il faut me ramener à Grenois, c’est le moment où j’dois bêcher mon jardin" ! Sacré Perrine !
Donc, pour finir, cette drôle de guerre était perdue.
Ode. à suivre...
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Raymond de Cagny