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Le Journal des Ecrivains

CONTE FANTASTIQUE "l’Intemporel"

Récit complet .

lundi 6 juillet 2015

DOCUMENT AUDIBLE, CLIQUER SUR L’ICONE

MP3 - 5.4 Mo

L’INTEMPOREL (première partie) 1/8

Grand blond, svelte, mais bien charpenté, il déambule dans la grande rue. La nuit vient juste de tomber sur cette fin de journée de septembre. La chaleur qui vient du sol sur lequel le soleil a tapé une partie de l’après-midi tiédit son visage.

Dans la pénombre, on ne peut que distinguer sa silhouette, longue, donnant l’impression de s’élever vers les cieux. Il est vêtu tout de noir et son long manteau affine encore cette silhouette distinguée autant qu’impressionnante.

Juste avant qu’il ne passe devant les maisons de cette rue déserte, les volets se ferment rapidement et violemment, comme à l’approche d’un ouragan.

Qui est-il ? Que veut-il ? Que vient-il faire ?

A quelques mètres derrière lui un souffle tourbillonnant balaie la rue. Les lampadaires soufflés par le tourbillon agitent les abat-jour qui font osciller les lumières. Leurs tintements métalliques mélangés de sons graves et aigus accroissent l’ambiance angoissante.

Devant cet homme qui marche calmement d’un pas régulier, c’est le calme le plus absolu hormis le claquement des volets fermés en hâte devant lui. L’homme marcha longtemps au milieu de la rue de ce village tout en longueur. Seuls ses pas résonnaient sur le sol, dans ce silence de cimetière. Il était facile de supposer que chacun, cloîtré derrière sa fenêtre, l’observait, la peur au ventre.

Tout à coup, il s’arrêta… Un silence pesant s’installa…

Il était là, immense et immobile, au milieu de cette rue déserte. Après quelques instants qui parurent, pour les villageois, une éternité, il fit un quart de tour sur sa gauche en direction d’une maison banale, sans signe particulier.

Les volets et la porte semblaient parfaitement fermés.

Dès qu’il dirigea son regard vers cette demeure, une sorte d’hologramme apparut entre lui et la maison. On distinguait un homme corpulent qui frappait une jeune femme. Il lui arrachait sa robe sous laquelle elle n’avait que peu de chose. La femme se débattait avec la force du désespoir. La lutte était trop inégale. L’homme frappa encore et encore. La femme s’évanouit. Il la viola.

Cette sorte d’hologramme disparut. L’homme en noir n’avait pas bougé.

Son regard dirigé vers la porte de la maison s’enflamma littéralement. Ses yeux devenus lumineux éclairèrent la porte de rayons intenses. Une fumée entoura d’abord la porte d’un nuage jaunâtre très épais répandant une affreuse odeur âcre qui prenait à la gorge. Il s’ensuivit un énorme brasier qui enflamma porte et fenêtres. La façade elle-même semblait maintenant en feu.

Une forme humaine se distinguait derrière les flammes après que la porte d’entrée eut entièrement brûlé. Des cris de supplique et de secours provenaient de cette forme dont on distinguait maintenant une nette ressemblance avec l’homme de l’hologramme. Les cris étaient accompagnés de sanglots.

L’homme en noir se dirigea lentement vers le brasier. Il traversa calmement les flammes comme si elles n’existaient pas. Il souleva l’homme gémissant par le col de ses vêtements et le ramena au milieu de la chaussée. Celui-ci resta agenouillé. Il gémissait et pleurait lamentablement et son corps était agité de soubresauts.

L’homme en noir poursuivit son chemin d’un même pas, calme et régulier. Il ne se retourna même pas.

Le tourbillon qui le suivait éteignit les flammes qui ne laissèrent aucune trace de leur passage. Seul, un individu lamentable se tordait de souffrance et de pleurs au milieu de la rue.

Fin de la 1 ère partie.

L’INTEMPOREL 2/8

Audible

MP3 - 4.1 Mo

Lorsqu’il arriva dans cette petite ville, tôt le matin, le soleil chauffait déjà fortement.

Malgré ses vêtements noirs et son long manteau, il semblait indifférent à cette chaleur. Il parcourut plusieurs rues, l’une après l’autre, calmement et de manière presque mécanique, comme s’il savait parfaitement où il allait et ce qu’il venait y faire.

A cette heure très matinale, peu de gens se trouvaient dehors. Ceux qui étaient dans la même rue que lui s’esquivaient rapidement. Il s’engagea dans une ruelle, fit quelques pas et s’arrêta. Il tourna lentement la tête sur sa gauche, son regard croisa celui d’une vieille femme ridée qui le guettait derrière un carreau.

Il resta immobile. La femme disparut. La porte d’entrée grinça sur ses gonds. La femme apparut dans l’encadrement de la porte. Ils s’observèrent l’espace d’un instant et la femme, d’un signe de l’index, l’invita à venir.

Elle recula devant lui pour lui laisser le passage. La porte d’entrée, comme toutes celles des maisons de village de cette époque, était relativement petite, ce qui l’obligea à s’incliner pour entrer.

La femme portait une robe noire, en partie recouverte d’un tablier de couleur sombre. Ses cheveux blancs étaient coiffés en chignon. Son beau visage, ridé comme une pomme trop mûre, laissait deviner que la vie n’avait pas été sans souffrance pour elle. En traînant doucement les pieds, elle entra dans la cuisine.

C’était une de ces cuisines, pleine de chaleur, toute en douceur. Il y régnait un calme indéfinissable.

Elle fit le tour de la table ronde et se trouva en face de son visiteur.

Il se tenait de l’autre côté, sa tête proche des poutres du plafond. Il paraissait encore plus grand, plus impressionnant dans cette petite pièce. Ils s’observèrent un long moment, comme s’ils se parlaient sans remuer les lèvres, rien que pour eux. Leurs visages étaient impassibles. Seuls leurs yeux échangèrent des regards intenses.

Tout en glissant les pieds sur le sol, elle s’approcha de lui. Elle lui prit la main et l’emmena dans une autre pièce.

La chambre était plongée dans l’obscurité. Seuls deux grands bougeoirs transmettaient une faible lumière. Sur le lit, étendu, son mari, mort, habillé, prêt à être enseveli.

La vieille femme, digne, ne pleurait pas. Elle tenait toujours son visiteur par la main.

Ils restèrent longtemps ainsi, puis il souleva délicatement cette merveilleuse grand-mère et l’allongea près du compagnon avec qui elle avait partagé une vie honorable et bien remplie. Pendant ce temps, leurs mains étaient restées l’une dans l’autre et ils ne s’étaient pas quittés du regard.

L’homme en noir desserra doucement les doigts de la vieille femme enlacés aux siens. Il lui croisa les mains sur le ventre. Le regard de la femme s’était fixé à jamais dans le sien. Il lui ferma les paupières et quitta doucement la maison.

FIN de la 2ème partie.

L’INTEMPOREL suite 3/8

MP3 - 2.8 Mo

Lorsque cet énorme autocar s’arrêta au milieu de la nuit devant la gare routière implantée en plein désert, l’homme en noir se leva et se dirigea sans se presser vers celui-là.

Dans le car, dont la contenance en voyageurs ressemblait à celle de l’un de ces avions moyens courriers, les voyageurs, qu’ils se connaissent ou non, jacassaient entre-eux.

Quand l’homme en noir entra par la porte avant située près du chauffeur, les voyageurs installés proche de celui-ci se turent. Au fur et à mesure que l’homme avançait vers le fond du car, il en fut ainsi. Certains firent mine de dormir, tandis que d’autres prirent leur journal pour se donner une contenance. Son passage dans l’allée centrale qui le dirigeait vers le fond du car semblait mettre mal à l’aise l’ensemble des voyageurs.

Seule, une petite fille était attirée par cet immense homme à l’allure impressionnante. Lorsqu’il passa près d’elle, elle le saisit par la main . Sa mère voulut la retenir, comme pour l’arracher à cette emprise qu’il avait sur la gamine. L’homme se retourna doucement, regarda tour à tour la gamine et sa mère. L’enfant lui souriait tandis que la mère lui jetait un regard apeuré. Il fixa la femme de son visage impassible, puis ses yeux, mais seulement ses yeux, semblèrent émettre l’expression d’un sourire. La femme lâcha doucement la main de la gamine qui suivit ce géant jusqu’au fond du car. Il la souleva comme on soulèverait un fétu de paille, l’installa sur la banquette et prit place près d’elle.

Le car ne tarda pas à démarrer, l’enfant s’endormit contre lui.

A l’aube, le car s’arrêta devant une petite halte prévue à cet effet.

L’homme descendit le premier, aidant l’enfant qui lui tenait toujours la main. La mère et quelques autres voyageurs descendirent à leur tour, puis le car s’éloigna. Il regarda l’enfant intensément, celle-ci lui lâcha la main et alla rejoindre sa mère qui l’attendait.

On apercevait un village à quelque distance de là, l’homme s’y dirigea.

Fin de la 3ème partie à suivre

L’INTEMPOREL 4ème partie 4/8

AUDIBLE

MP3 - 5.9 Mo

Après qu’il eut marché quelque temps sur une piste poussiéreuse, l’homme en noir se trouva dans la rue principale. Il la parcourut jusqu’au moment où il vit l’enseigne d’un motel, genre saloon. Il y entra.

Une énorme matrone à l’allure rébarbative le toisa. " C’est pour quoi ? " demanda-t-elle. " Une chambre " répondit-il simplement. Elle décrocha une clé derrière elle et la balança sur le comptoir. " C’est pour combien de jours ? " demanda-t-elle encore. " On verra " dit-il. En prenant la clé, il se dirigea vers l’escalier. Il n’avait aucun bagage.

Arrivé sur le palier, il repéra les numéros des portes, remarqua la sienne, l’ouvrit et s’engouffra dans la chambre. Il referma la porte derrière lui, ouvrit la fenêtre et s’allongea tout habillé sur le lit.

Il ferma les yeux et eut l’impression de s’endormir. Lorsqu’il les rouvrit, elle était là. Assise sur le grand fauteuil recouvert de velours bordeaux, elle portait cette jolie robe bleue pâle faite d’organdi et de satin. Elle était aussi blonde que lui, leurs yeux étaient eux aussi du même bleu et avaient en commun cette forme d’amande.

Il se redressa, s’assit sur le bord du lit. Elle ne bougea pas. Il marmonna pour lui même " que veux-tu encore me demander ? N’en ai-je pas assez fait ? Est-ce que cela va durer encore longtemps ?

De son apparence fantomatique, transparente, elle répondit d’une voix douce et légère qui ressemblait plus à un souffle qu’à des sons humains.

" Tu as une mission à remplir et tu dois aller jusqu’au bout. Quand le moment sera venu, tu ne me verras plus. Tu pourras alors remplir ta vie comme bon te semblera, mais pas avant d’avoir terminé ta tâche."

" Quand cela va-t-il prendre fin " demanda-t-il, comme pour lui-même, " quand ? "

Il se leva, se retourna vers le fauteuil, celui-ci était vide.

Il s’étira, remit de l’ordre dans ses cheveux et ses vêtements et sortit.

La rue était plus animée qu’à son arrivée. Il la traversa pour se rendre chez le barbier juste en face. Un client se levait, rasé de près et coiffé. Le barbier brossa le gilet du client en tournant autour de lui, comme on l’imaginerait faire dans un opéra comique. Il passa derrière sa caisse dont le tiroir sonna à l’ouverture. Il encaissa et rendit la monnaie. Comme une sorte de danseur, il contourna la caisse pour accompagner son client ver la sortie. Il salua celui-ci d’une petite courbette et vint s’enquérir de ce que voulait l’homme en noir.

Après qu’il l’eut installé et que celui-ci eut allongé ses longues jambes pour faire reposer ses santiags sur la tablette du lavabo, le barbier lui recouvrit le visage d’une serviette chaude.

Le barbier tente vainement d’engager la conversation par des banalités du genre " vous êtes chez nous pour quelques jours ? Pour affaires sans doute ? " L’homme en noir se contenta, pour toute réponse, d’un regard dissuasif qui glaça le barbier. Il compris que son client n’était pas bavard.

Après quelques instants, il retira la serviette et massa le visage de ce client peu communicatif. Puis en se munissant de ses accessoires, savon et blaireau, il tourna autour d fauteuil en quelques pas de danse, tout en lui savonnant le visage d’une mousse qu’il avait fait monter comme un cuisinier aurait fait monter une mayonnaise.

Après qu’il se fut hissé sur la pointe des pieds pour brosser le col de ce client hors du commun et qu’il eut encaissé son dû, le barbier contourna l’homme en noir en formant, à petits pas pressés, une espèce de cercle autour de lui pour l’accompagner jusqu’à la porte. Là, il s’inclina comme un artiste salue son public et attendit que le client fut sorti pour se redresser enfin.

L’homme en noir avança, en marchant sans se presser, en plein milieu de la rue principale. Les gens s’écartaient devant lui et évitaient son regard.

Il emprunta une rue perpendiculaire et, après avoir parcouru une courte distance, il la vit. Elle était là, avec son visage d’ange, charmante, souriante, la petite fille de l’autocar.

Il s’arrêta. Elle vint au devant de lui, le prit par la main, l’entraîna, tout en inclinant sa tête contre ce géant, elle, si petite.

Après qu’ils eurent fait quelques pas, la petite fille s’arrêta. La mère était là, devant la porte grande ouverte. Elle le regarda, puis se retourna et enta dans la maison. L’homme et la fillette la suivirent.

L’enfant n’avait pas lâché la main de celui qu’elle avait adopté comme son protecteur. Elle avait toujours la tête inclinée contre lui. Sa longue chevelure blonde et son visage pâle tranchaient sur le manteau noir de l’homme. On aurait dit un tableau, œuvre d’un grand Maître.

Fin de la 4ème partie.

L’INTEMPOREL 5 ème PARTIE 5/8

AUDIBLE

MP3 - 3.5 Mo

Ils montèrent un escalier, la femme s’arrêta sur le palier devant une porte qu’elle entrouvrit. Elle s’écarta pour laisser le passage à l’homme. La fillette le tira par la main, "viens" dit-elle doucement, puis se tournant vers lui pour lui faire face, "tu vas faire quelque chose pour lui, hein ? Tu vas le faire ? ". Sans regarder la gamine qu’il tenait toujours par la main, il poussa la porte et entra.

La mère était restée sur le palier.

Dans cette chambre d’enfant un petit garçon blond était dans le lit, inerte, pâle, le teint presque transparent. La fillette tira l’homme par la main pour qu’il s’approche du lit. Puis, sans quitter le petit garçon du regard, elle renouvela sa question "tu va&s faire quelque chose pour lui, hein ? Tu vas le faire ?" L’homme approcha sa main du visage de l’enfant, il sentit un souffle à peine perceptible.

Il se recula doucement du lit, jeta un regard circulaire et s’empara d’une chaise paillée qu’il approcha du lit. Il s’y assit, la gamine resta tout contre lui.

Lorsqu’il ouvrit les yeux, il fut surpris de voir que la nuit tombait.

Il n’avait pas bougé depuis le matin. Il était seul dans la pièce plongée dans la pénombre, avec ce petit garçon dans le lit. Dans la maison, il n’y avait aucun bruit, aucun signe de présence. Il s’inclina doucement au-dessus du lit, passa sa main autour du visage calme de l’enfant. Il la laissa quelques instants au-dessus de son front. Le petit garçon cligna des yeux plusieurs fois et finit par les tenir grands ouverts, le regard limpide dirigé vers le plafond.

L’enfant avait les yeux bleus, en forme d’amande…

L’homme en noir descendit doucement l’escalier. Elle se tenait là, assise sur la dernière marche, à l’attendre. Quand elle entendit son pas derrière elle, elle se leva, se retourna pour lui faire face. Il arriva près d’elle, il la souleva et la tint dans ses bras un long moment à la regarder. Ils échangèrent un regard plein de complicité. Elle lui caressa les cheveux et dit d’une toute petite voix " tu l’as fait, hein ! Tu l’as fait ! "

Il la reposa à terre, elle lui prit la main et dit " demain c’est dimanche, tu viendras me chercher, on se promènera tous les deux. Tu verras, je me ferai belle, je mettrais ma robe des dimanches rien que pour toi." Elle lui lâcha la main, il avança jusqu’à la porte qu’il ouvrit pour sortir. Il se retourna, elle le regardait d’un air interrogateur. " 10 heures " dit-il simplement. "Demain matin, 10 heures."Il tira la porte derrière lui et disparut.

Fin de la 5ème partie.

A suivre...

L’INTEMPOREL 6 PARTIE

MP3 - 4.3 Mo

Ce soir là, il marcha longtemps avant de rentrer à l’hôtel. Il se sentait bien, mais épuisé. Il avait besoin de respirer avant de dormir. La chaleur de la journée faisait ressortir de bonnes odeurs d’herbes fanées et de terre.

Il arriva devant l’hôtel, respira encore profondément, escalada les marches plus qu’il ne les monta. La matrone était assise derrière son comptoir. Elle lisait une revue à scandale. Elle lui jeta un regard bovin par-dessus ses lunettes à grosses montures et se replongea dans sa lecture.

Il lui sembla qu’il ne dormait pas depuis longtemps lorsqu’il s’éveilla en sursaut. Il alluma le plafonnier. L’ampoule pendait lamentablement au bout de son fil. Elle était recouverte d’un de ces vieux abat-jour de tôle émaillée autour duquel se balançaient quelques perles. Il écarquilla les yeux comme pour mieux se réveiller.

Elle était là, assise sur le fauteuil avec sa robe bleue pâle faite d’organdi et de satin. Elle paraissait presque réelle, à peine transparente.

" Que veux-tu encore ? " Demanda-t-il doucement. " C’est bien ce que tu as fait, c’est très bien ! " Souffla-t-elle.

La lumière s’éteignit brusquement. Lorsqu’il ralluma, elle avait disparu. Il mit longtemps avant de se rendormir.

Au petit matin, il se demanda s’il allait prendre le car pour repartir o bien s’il allait rejoindre la fillette. Il savait bien, au plus profond de lui-même, qu’il ne pouvait lui jouer pareil mauvais tour. Aussi, décida-t-il de se lever et d’aller respirer l’air frais du matin.

Après avoir pratiqué une longue marche en solitaire dans la campagne déserte, il arriva devant la maison. Elle était là à l’attendre. Elle avait mis sa robe des dimanches, une robe bleue pâle faite d’organdi et de satin.

Sans mot dire, il la prit par la main. Ils s’éloignèrent de la maison en direction de la plaine. De les voir ainsi, elle si petite et lui si grand, donnait toujours l’impression de regarder une image irréelle.

Au bout d’un moment, elle lui dit " tu as voulu partir, hein ? Tu as voulu m’abandonner ! " J’y ai pensé " dit-il, " c’est vrai, j’y ai pensé ".

" Tu sais bien que tu ne peux pas, alors pourquoi ? Pourquoi ?"

" Il n’y a pas de mal d’y avoir pensé " répondit-il simplement. Tous les prisonniers pensent à s’évader, tous !…

" Oui, mais toi, tu dois remplir ta tâche, tu le dois, n’espère rien d’autre avant d’avoir rempli ta mission. "

Cette petite bonne femme s’était exprimée comme une adulte. Avec sa toute petite voix, elle avait parlé avec fermeté et conviction.

La mère s’était assise sur les marches, devant la maison, à les attendre. Il était aux environs de midi lorsqu’ils revinrent. Il s’arrêta à quelque distance de la maison. La gamine lui lâcha la main, lui fit face. Ils échangèrent un long regard, les yeux dans les yeux, puis la fillette se retourna pour rejoindre sa mère. Il fit, lui aussi, demi-tour et se dirigea vers l’hôtel.

Il aurait bien voulu quitter ce village, s’éloigner à tout jamais, mais quelque chose le retenait. Il ne savait quoi, mais ce dont il était certain, c’est qu’il lui était impossible de s’éloigner.

La chaleur était à peine supportable à cette heure de la journée. Les habitants désertaient les rues pour se cloîtrer derrière leurs volets, à l’abri du soleil.

L’homme en noir marcha de son pas régulier habituel, rejoignit son hôtel. Il traversa le hall tout aussi désert que les rues et entra dans sa chambre.

A suivre

L’INTEMPOREL 7 PARTIE

MP3 - 3.4 Mo

Il laissa les volets grands ouverts car il ne semblait pas incommodé par la chaleur, ni d’ailleurs par quoi que se fut d’autre. Il s’allongea sur son lit tout habillé et ferma les yeux.

Lorsqu’il les ouvrit, la lumière était moins intense, ce devait être la fin de l’après-midi. Il se leva, mit de l’ordre dans ses cheveux et dans ses vêtements ; puis sentit qu’il devait retourner dans la maison. Il quitta l’hôtel toujours désert et se dirigea vers le centre du village.

Lorsqu’il arriva en vue de la maison, il remarqua une vingtaine d’hommes armés de pelles et de fourches ou de gourdins. Un murmure inquiétant s’éleva. Ils disaient : " il ne va quand même pas nous faire peur, il est tout seul !". Tandis que d’autres reprenaient " Qu’est-ce qu’il peut bien faire contre nous tous ? Hein ! Pourquoi on aurait peur ? Ils tenaient ces propos pour se rassurer mutuellement, mais en fait, il était évident qu’ils crevaient de peur.

Ils formèrent un cercle devant la maison.

L’homme en noir ne s’était pas arrêté. Il marchait de son pas calme et régulier. Lorsqu’il s’approcha du cercle, les deux hommes, les plus proches de lui, s’écartèrent pour le laisser passer. Ils refermèrent le cercle derrière lui et quand il fut en son milieu, demandèrent " Pourquoi tu l’as laissé mourir ? Hein ! Pourquoi t’as fait mourir ce petit garçon ? C’est pour ça que t’es venu ? Hein ! C’est pour ça ? " Ceux qui se trouvaient derrière lui commencèrent à le frapper. L’homme en noir s’arrêta, tira son immense manteau sur sa tête. Les hommes en groupe, à vingt contre un, se sentaient forts, invulnérables. Ils redoublèrent de violence, tous s’y mirent. Au bout d’un moment, essoufflés et soulagés, ils s’arrêtèrent. Ils s’écartèrent en cercle à nouveau. Au milieu, on ne distinguait plus qu’une masse noire. La femme sortit de la maison. Les hommes s’écartèrent pour la laisser s’approcher. L’un d’eux se mit devant elle " Vaut mieux pas M’dame, vaut mieux pas." Elle l’écarta d’un revers de la main. Elle se dirigea au centre du cercle, contempla un moment la masse noire.

Elle se baissa doucement, prit le manteau par le col, le souleva. Il était vide. Elle le secoua de sa poussière, le plia de son mieux pour pouvoir le porter et se dirigea vers la maison.

Les hommes en cercle sentirent une immense peur les envahir. Certains lâchèrent leurs armes pour fuir plus rapidement, tandis que d’autres restaient figés sur place. L’un d’entre eux réussit à prononcer, comme pour lui-même " C’est le diable cet homme là ! C’est le diable !"

La femme avait rejoint la maison. La petite fille l’attendait au bas de l’escalier. Elles montèrent doucement, entrèrent dans la chambre du petit garçon. L’homme en noir, sans son manteau, dormait paisiblement allongé sur ce lit d’enfant trop petit pour lui.

A suivre

L’INTEMPOREL 8 Suite et fin audible

MP3 - 4.3 Mo

Lorsqu’il se réveilla, il constata que la nuit était tombée. Il se leva doucement, s’étira, s’assit un moment au bord du lit d’enfant, puis se leva à nouveau, prit son long manteau plié soigneusement sur la chaise paillée. Il l’endossa et descendit l’escalier.

La maison était vide et sentait le renfermé. Les marches de l’escalier craquèrent sous son poids.

Il jeta un coup d’œil dans les pièces qui donnaient sur l’entrée, au bas de l’escalier. La maison était vide depuis longtemps sans doute. Ni meubles, ni quoi que se soit ne laissait apparaître une habitation récente.

Il tira sur la vieille porte vermoulue pour sortir, celle-ci grinça sur ses gonds, puis avec de grands craquements, elle s’entrouvrit enfin. L’homme en noir sortit. Tout était calme. Il rejoignit son hôtel sans encombre et une fois dans sa chambre, s’endormit rapidement.

Il sentit un froid glacial l’envahir. La lumière était allumée. Elle était là près du lit cette femme belle et blonde, aux yeux bleus en forme d’amande. Elle lui souffla " Tu es libre maintenant. Tu ne me verras plus. Tu peux te rendormir avec la conscience du juste ". La lumière s’éteignit. Il se rendormit comme après un cauchemar.

Il entendit dans un demi-sommeil, comme une corne de brume. Il fit un effort pour se réveiller complètement. La sirène du car…Oui, c’était bien elle qui l’avait réveillé !

Dans ces villages éloignés les uns des autres par de grandes distances, les chauffeurs avaient pour habitude de faire halte pendant une heure environ. A leur arrivée, ils signalaient leur présence par un long coup de trompe. Une demi-heure plus tard, c’était deux coups brefs, enfin, au moment du départ, trois longs coups signalaient aux retardataires qu’il était urgent de se presser.

Il n’y avait eu qu’un seul coup de trompe. Il avait donc une heure devant lui pour se rendre au départ.

Il s’habilla sans hâte, descendit l’escalier, se rendit au comptoir de la réception pour payer. Une jeune et jolie femme l’accueillit d’un sourire. " Eh bien ! Vous, on peut dire que vous aviez du sommeil en retard. Trois jours que vous dormez, sans boire ni manger, je n’avais jamais vu ça, non jamais !" Il la regarda étonné, jeta un coup d’œil autour de lui. L’hôtel était accueillant. Des voyageurs étaient attablés autour d’une de ces grandes tables d’hôtes, à prendre leur petit déjeuner. Aucun d’entre-eux ne prêta attention à lui.

Il régla sa note, échangea un sourire avec la jeune patronne et sortit.

Il se sentait bien, léger, reposé. La seule impression bizarre qu’il ressentait était d’avoir déjà vécu cet instant, d’être déjà venu au même endroit, à une autre époque ou dans une autre vie.

Il faisait déjà chaud en ce début de matinée, mais il n’était pas incommodé par la chaleur malgré ses vêtements noirs et son long manteau. Il se dirigea tranquillement vers le car lorsqu’il entendit les deux coups brefs lui annonçant qu’il avait encore une demi-heure devant lui ;

Il attendit tranquillement que tous les voyageurs soient installés et monta le dernier. Dans le car, personne ne fit attention à lui malgré sa silhouette impressionnante, par sa taille et par son allure. Il s’installa confortablement.

Il sentit une petite main prendre la sienne.

Il regarda la gamine. C’était une toute petite fille blonde, au visage d’ange, aux yeux bleus en forme d’amande.

Elle portait une robe bleu pâle faite d’organdi et de satin ...

Fin

Vous retrouverez les personnages de ce comte dans d’autres histoires.

Raymond de Cagny


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Raymond de Cagny

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