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Le Journal des Ecrivains

DROLE DE PAIX 11

mardi 27 janvier 2009

LA DRÔLE de PAIX suite

MP3 - 3.3 Mo

Mon père était tout comme moi, bavard et plein d’humour.

Un jour, un soldat allemand voulu prendre place dans le fauteuil, pour se faire raser.

Mon père armé d’une blouse blanche, se posta derriere lui et leva cette blouse, en biais, le devant largement ouvert et dit : "s’il vous plaît, passez la manche."

J’ai retenu mon rire derrière ma caisse-cachette. Je savais bien que cette armée aurait bien voulu passer la Manche…

Mon père aimait bien qu’on l’écoute parler !

Ce matin là, il était en verve. L’allemand lui demanda en jargon et en gestes "de lui couper , un peu, les cheveux dans le cou" Mon père champion de la coupe au rasoir, en prit un dans son tiroir et se dirigea à l’arrière du fauteuil.

Cet homme un peu frustré, sans doute, dit "nous, Allemagne, tondeuse électrique" et mon père de rétorquer "nous aussi , mais pour chiens, nous, rasoirs !"

Mais nos vainqueurs d’autrefois et amis d’aujourd’hui étaient cependant paisibles à Mériel.

Il s’est passé quelque chose qui était enfoui dans ma mémoire, et que je fais revivre pour vous.

Un soldat s’était tué en roulant avec sa moto. Le chef de la Kommandantur demanda à notre Maire qu’il soit enterré dans notre cimetière communal.

Le curé était pour le oui ; Un service religieux aurait lieu en son Église. Le maire était pour le oui, les conseillers municipaux étaient tous, sans exception, pour le non.

Polémique !

La population, tout au moins celle qui fréquentait les salons de coiffure était en majorité pour le non.

"Ne pas mélanger nos morts tués dans la drôle de guerre, avec les morts des vainqueurs de la drôle de paix, en quelque sorte." Cela leur semblait impossible. Mon père ne disait rien à ce sujet, et essayait de changer le cours des discutions.

Ce soldat eut droit à un coin de cimetierre. Je dis bien à un coin, car il n’était pas à côté du dernier enterré, ce qui fit toute la différence !

Le cortège traversa tout le pays en grand apparat. Soldats en motos, roulant au pas, fanfare, drapeaux en berne. Je les ai entendu chanter d’une voix gutturale : Ich hatte einen kameraden ! (J’avais un camarade)

Cachée derrière un double rideau, j’ai regardé. J’étais subjuguée par la force imposante de ce défilé, tout cela pour un seul homme !

J’ai retenu mes larmes. Mon père a senti le tremblement de mes épaules, cela l’a troublé. Il ne m’a rien dit. Je n’ai parlé à personne de ce que j’avais ressenti, même pas à lui !

J’étais profondément chrétienne.

Mais à cet instant là, j’ai été profondément contre la guerre et contre la violence et pour l’amour de mon prochain…

Plus en avant dans les années, j’ai trouvé que les Hippies avaient raison d’aimer !

Est-ce que le corps de cet ennemi n’avait pas droit à un coin de terre ? "Tu es poussière et tu retourneras poussière" Est-ce que son âme arriverait aux portes de Saint Pierre, ou errerait pour l’éternité jusqu’au Jugement dernier ? Malgré l’inscription de son ceinturon écrit dans la langue qu’il avait appris à parler « Gott mit uns « (Dieu avec nous).

Ma vie journalière s’écoulait doucement, moitié parents, moitié pension à l’Isle-Adam….

Ode à suivre


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Raymond de Cagny